Le vignoble

Aujourd’hui, Mesnac dépend administrativement de Cognac (canton, arrondissement et communauté de communes), mais dépend aussi économiquement …du cognac, tant la vigne y a pris de place. Cependant, dans la carte des crus de cette eau-de-vie, la commune se situe dans les « Fins bois » (en bleu), alors que ses voisines Cherves-Richemont et Saint-Sulpice sont dans les Borderies (en rouge).

classement de 1936-38

Il se dit que le maire de l’époque avait été absent lors d’une réunion décisive, mais il est vraisemblable que l’étude géologique de Coquand (voir Dans le Pays-Bas) a été pour beaucoup dans cette relégation. Et celle-ci a au moins un avantage : isolé entre la Charente-Maritime et les Borderies, Mesnac est préservé d’une fusion qui, logiquement compte tenu de l’histoire et de la géologie, ne pourrait guère se faire qu’avec Cherves mais supposerait une révision du classement. En revanche, une telle opération aurait été possible avant le décret de 1909, quand Cherves n’était pas dans les Borderies, plus restreintes qu’aujourd’hui, et n’aurait donc pu absorber Richemont.

classement de 1887
Après le décret de 1909,
Mesnac était, non dans les Fins Bois, mais dans les
Premiers Bois (en vert), supprimés en 1936

La châtellenie de Cognac

Avant la Révolution, Mesnac dépendait de la châtellenie de Cognac et Merpins, qui débordait sur la future Charente-Maritime. Gustave Dupont-Ferrier, dans sa thèse latine Quæ fuerint […] in Engolismensi “apanato” comitatu instituta, 1445-1515 (Picard, 1902, p. 219-234) en donne la composition vers 1490, sous Charles d’Angoulême :

COGNACCompiniacum, Compniacum, Compnacum, Cogniacum, Cognacum. « La chastellanie de Coignac ; la parr. de Boutiers, Cherves, S. Suplice [Saint-Sulpice], Mesnac, Angles et Chasteau-Bernard, Burie [17], S. Laurens, Ars, Salles [d’Angles], Richemont [auj. réuni à Cherves], Genté, Villars [17], Croign et Javersac [Crouin et Javrezac], Aumosnerie de Coignac, Puypérou et l’enclave de Boys-Redont (17) » (1487 et sv.).
Puypéroux et Boisredon sont à chercher tout au sud de la Charente-Maritime ; on ne les trouvera donc pas sur les cartes qui suivent. L’enclave de Saint-Georges de Richemont dépendait du siège de Saintes « delà la rivière de Charente », auquel était également attribué Javrezac en 1590.

MERPINSMerpisium. « La chastellanie de Merpins ; la parr. de Gimeux, de Sallignac et le Prunelar [Le Prunelas en Salignac, 17], Gensac et Roissac [ce dernier auj. dans Angeac-Champagne], Bourg-Charente et le village de Molins-neufz [auj. Moulineuf], S. Bris [Saint-Brice], S. Trojan [auj. réuni à Boutiers], Dompierre [17, sans Orlac, auj. dans la même commune], S. André et l’enclave de Louzac » (1488 et sv.).
Louzac dépendait pour l’essentiel du siège de Saintes « delà la rivière de Charente ».

Vers 1700, Jean-Baptiste Nolin a dessiné une carte de la généralité de La Rochelle dédiée à l’intendant Bégon, dont elle complète utilement le Mémoire :

Elle a cependant le défaut d’établir une continuité impossible, par exemple entre Dompierre et le reste de la châtellenie de Merpins. Il suffit de reprendre une carte des communes actuelles, point trop différentes des paroisses de l’Ancien Régime, pour constater que cette dernière était en fait morcelée :

En 1789, elle s’était fondue dans celle de Cognac et la liste des paroisses s’était quelque peu modifiée. La voici telle que la donne Prosper Boissonnade (Essai sur la géographie historique et sur la démographie de la province d’Angoumois du XVIIe siècle au XIXeAngoulême, 1890, p. 85, 98-101 et 109-110) :

Ars (?), Bourg-Charente, Boutiers, Châteaubernard, Cherves, Crouin [absorbé par Cognac en 1867], Cognac, Genté, Gimeux, Graves, Javrezac, Louzac, La Magdeleine (?), [Merpins], Mesnac, Puypéroux, Richemont, Saint-André, Saint-Brice, Saint-Laurent, Saint-Martin [absorbé par Cognac en 1847], Saint-Sulpice, Saint-Surin (?) [aujourd’hui dans Châteauneuf], Saint-Trojan, Salles ; Burie, Dompierre, Roumette, Salignac, Villars (17).
Angles et Gensac auraient donc été partagées avec la châtellenie de Bouteville cependant que Chassors l’aurait été avec celle de Jarnac – la partie relevant de Cognac est devenue la commune de Julienne, séparée de Chassors après la Révolution.
Il faudrait d’autre part ajouter trois paroisses un peu éloignées : Graves et, avec une marge d’incertitude, Saint-Surin (auj. dans Châteauneuf) et La Magdeleine (aujourd’hui réunie à Criteuil) – ainsi que Julienne et l’enclave de Roumette, aujourd’hui dans Saint-Bris des Bois – et inclure Louzac en totalité. En revanche, Angles et Gensac n’auraient pas été comprises entièrement dans la châtellenie.

Une carte de 1630 permet de situer les enclaves sans donner toutefois les limites de la châtellenie autres que celles qui coïncident, à l’ouest, avec la frontière de l’élection de Saintes et au nord avec celle de l’élection de Saint-Jean d’Angély :

Mesnac touchait par conséquent à la limite nord de la châtellenie (et de l’Angoumois). Le bois de Cognac, au bord du Véron et près de La Samsonnerie, tient sans doute son nom de là – tout comme la motte de Cognac, aujourd’hui disparue, qui figurait sur la carte de 1763 (voir Le Marais), entre Saint-Sulpice et Migron.

Angoumois ou Saintonge ?

Depuis 1239, la châtellenie de Cognac dépendait du comté (puis, à partir de 1515, duché) d’Angoulême, constituant une part importante de ce que P. Lacroix a dénommé l’Angoumois occidental. Néanmoins elle se rattache à la Saintonge à un double titre. Linguistique d’abord, puisque le domaine du saintongeais s’étend à l’est au-delà d’Angoulême. Religieux ensuite, car, jusqu’à la création des départements, le diocèse de Saintes allait jusqu’à Bassac inclus ; or son territoire coïncidait avec celui des Santons. Comme on peut le voir sur la carte ci-après, il est borné à l’est par un petit affluent de la Charente, la Guirande, dont le nom, issu comme Aigurande ou Ingrandes d’Equoranda ou Egoranda, est un marqueur de frontière entre cités gauloises.

Mesnac se trouvait au XVIIIe siècle dans l’archiprêtré de Burie, mais celui-ci était apparemment.de création assez récente. Boissonnade plaçait la paroisse dans l’archiprêtré de Jarnac, ce qui était effectivement le cas en 1326, lors d’une levée de subsides dont les états permettent de dresser cette carte approximative, allant de Chaniers à Bassac sans franchir la Charente au sud – Mesnac y apparaît en sombre :

On déplore aujourd’hui l’empilement des collectivités. Sous l’Ancien Régime, la plaie consistait plutôt dans l’enchevêtrement des circonscriptions. Du point de vue fiscal, l’élection de Cognac était l’une des cinq dont se composait la généralité de La Rochelle alors que celle d’Angoulême dépendait de la généralité de Limoges. Mais, en matière judiciaire, le siège royal de Cognac était rattaché à la sénéchaussée d’Angoulême, tandis qu’en matière militaire, Saintonge et Angoumois formaient un seul gouvernement.